Le patrimoine juif de L’Isle-sur-la-Sorgue

La ville de L’Isle-sur-la-Sorgue porte une attention toute particulière à la connaissance et à la valorisation de son patrimoine judéo-comtadin. Ces dernières années, des études historiques et archéologiques ont permis de mettre en lumière l’histoire des « Juifs du Pape » à L’Isle. Aujourd’hui, la ville travaille sur d’ambitieux projets de mise en valeur des sites.

Qui étaient les « Juifs du Pape » ?

Le Comtat Venaissin, état pontifical depuis 1274, a été le refuge durant plusieurs siècles des communautés juives persécutées et expulsées en d’autres lieux (Angleterre à la fin du XIIIe siècle, France au début du XIVe siècle, Espagne, Portugal et Provence, à la fin du XVe siècle).

Cette population, désignée dans la littérature contemporaine sous le nom de « Juifs du Pape »,y bénéficie d’une tolérance toute relative au sein des ghettos, appelés « juiveries » ou « carrières » (carriero en provençal désigne une rue).

De leur isolement contraint, ces communautés développent une culture spécifique dite « judéo-comtadine ». Après le rattachement d’Avignon et du Comtat Venaissin à la France en 1791, les juiveries se vident d’une population bénéficiant désormais de la liberté de culte et de circulation.

De cette histoire singulière, Avignon et le Comtat Venaissin, conservent un patrimoine unique et spécifique : synagogues, cimetières, immeubles, bains rituels … qui attire chaque année des visiteurs du monde entier.

La juiverie de L’Isle

La présence de familles juives est attestée à L’Isle depuis 1268. D’abord mêlées à la population de la ville, elles se regroupent progressivement à partir de la seconde moitié du XVe siècle à l’emplacement de la juiverie.

Au XVIIIe siècle, ce quartier réservé couvrait une superficie de près de 6 000 m² où résidaient entre 300 et 400 personnes. L’habitat au sein de la carrière était dense et pouvait s’élever sur 4 voire 5 étages.

Un certain enrichissement de plusieurs familles permet à la communauté de réaliser des travaux d’embellissement et d’assainissement du quartier : pavage des rues en 1758, reconstruction de la synagogue à partir de 1759. Des familles édifient ou modernisent des habitations à l’image des immeubles Beaucaire et Carcassonne qui sont aujourd’hui de rares  témoignages de l’architecture civile du XVIIIe siècle dans les carrières comtadines.

Avec la Révolution, ce quartier est en grande partie abandonné et les maisons tombent en ruine, situation aggravée par le siège subi par la ville en 1973. Des maisons, voire des îlots entiers sont rasés, ce qui a conduit à la configuration actuelle de cette place qui a conservé au fil du temps son toponyme de place de la Juiverie.

La place de la juiverie à la fin du XIXe siècle (collection particulière)

Plusieurs projets ont pour ambition de redonner une dimension patrimoniale et mémorielle à ce lieu singulier du centre ancien : restauration de l’escalier de l’immeuble Beaucaire, mise en valeur de l’emplacement de la synagogue et des immeubles.