Situé sur l’esplanade Robert Vasse, le château Dumas accueille les bureaux de la Caisse d’Epargne depuis 1918. C’est un remarquable exemple de l’ensemble de villas de style éclectique construites dans le dernier quart du XIXe siècle par la bourgeoisie l’isloise issue de l’industrie et du négoce.
Une maison de maître construite pour Xavier Dumas
En 1877 Xavier Dumas achète le moulin hydraulique Milhe situé entre la Sorgue du Midi et le canal du moulin et le transforme en moulin à broyer le plâtre. Avec son frère Honoré, ils étaient déjà propriétaires depuis dix ans du moulin et du domaine de Mousquety, situé également à L’Isle-sur-la-Sorgue, à la limite du territoire de Lagnes.
Il fait construire vers 1880 une maison de maître sur la parcelle de jardin mitoyenne de la plâtrière. Sans héritier, il vend cette bâtisse à son neveu Hyppolite en 1889. Ce dernier perd ses deux fils lors de la Première Guerre mondiale et cède cette maison en 1918 à la Caisse d’Epargne qui était installé depuis sa création en 1840 dans les locaux du Mont-de-Piété, dans l’actuelle rue Paul Monition.
Une œuvre de l’architecte André Jean Boudoy
Né dans la région lyonnaise en 1841, André Jean Boudoy arrive avec sa famille à Avignon à l’âge de 8 ans.
Il est formé à l’architecture à l’école nationale des Beaux-Arts de Paris entre 1862 à 1870 où il est l’élève de Charles Garnier qui l’emploie au chantier de l’Opéra de Paris.
Il revient s’installer à Avignon en 1871 où il poursuit sa carrière jusqu’à son décès en 1884 alors qu’il dirigeait les travaux du théâtre d’Orange.
En 1879, il a été lauréat du concours pour la réalisation de l’école Benoit de L’Isle-sur-la-Sorgue dont les travaux se déroulent entre 1880 et 1883. C’est sûrement à cette occasion qu’il reçoit la commande des plans pour réaliser les villas pour deux importants industriels de la ville : Frédéric Fourmon (actuel château Reboul, avenue Fabre de Sérignan, construit entre 1879 et 1881) et Xavier Dumas.
Une maison de style éclectique
A L’Isle à la fin du XIXe siècle, un important mouvement de constructions de maisons bourgeoises témoigne de la prospérité de la commune. Une nouvelle classe aisée affiche ainsi une réussite exceptionnelle avec des maisons spacieuses, confortables, sur des terrains vastes hors du centre ancien et près de la Sorgue.
L’architecte fait usage de l’éclectisme où les styles historiques se mélangent, parfois avec des apports d’autres cultures, sans règles ni adéquation entre le style et la fonction du bâtiment. Parmi les maisons éclectiques de L’Isle on retrouve le château Giraud.
Ici la loggia, d’influence italienne, côtoie une tourelle et des gargouilles d’inspiration médiévale tandis qu’une frise de carreaux aux motifs floraux souligne la séparation entre les deux derniers niveaux de l’édifice.
Des vitraux ferment les baies de l’avant-corps central de la façade principale, où l’on peut voir le monogramme HD faisant référence à Hippolyte Dumas.
La seule modification notable du bâtiment a porté sur l’escalier extérieur qui est aujourd’hui perpendiculaire à la façade principale et qui, à l’origine, y était accolé comme on peut le voir sur la carte postale ci-dessous.
Une plâtrière devenue jardin public
La plâtrière Dumas est un site industriel où est broyé le gypse, extrait et cuit dans les carrières situées au nord du territoire de L’Isle-sur-la-Sorgue. Le plâtre est mis en sac et expédié notamment par le chemin de fer.
En 1882, Xavier Dumas s’associe à Emile Char pour fonder la maison X. Dumas et Char. Par la suite, ce dernier, seul propriétaire, créé la Société Char et compagnie qui devient la Société des Plâtrières de L’Isle avant d’être absorbée par la société des plâtrières de Vaucluse au début du XXe siècle.
Suite à des plaintes des riverains incommodés par la poussière générée par cette activité, le site est abandonné au début des années 1930. La Caisse d’Epargne s’en porte acquéreur en 1937 et détruit l’ensemble des installations afin d’aménager un jardin public inauguré en 1945.